Travaux des élèves à partir du roman
Les élèves de 1ère ST2S1 ont imaginé la lettre de rupture que Gerda aurait envoyée à Capa après sa demande en mariage. Ils ont tenté d'y exprimer l'esprit indépendant et libre de Gerda.
Madrid, Juillet 1936
Robert,
Je dois te le dire. Non, je t'épouserai pas. Il est temps en effet de répondre à la question que tu m'a posée l’autre jour, sur le front espagnol. Tu pensais que j'allais te répondre positivement ?...
Tu t'es trompé ! Oui, tu t'es bien trompé ! Je ne veux pas me marier avec toi, Robert ! Jamais ! Plutôt mourir !
Pourquoi refuser de t'épouser ? J'y ai bien réfléchi. Non, cela est hors de question. Certes, c'est grâce à toi que je suis photographe. Certes, c'est toi qui m'as tout appris. J’ai plaisir à me remémorer ces promenades dans Paris, le Leica à la main, un Leica sans pellicule, le temps de l’adopter, le connaître, le comprendre. C’est vrai, Robert, tu m’as ouvert les yeux sur la photographie. Certes, tu as partagé ta passion avec moi, mais elle m'a entraînée dans une aventure où n'as plus ta place. Je prends mon envol... À présent, je veux avancer seule. Être libre !
Malgré mes sentiments toujours présents, ma passion a disparu. Notre amour est éphémère, Capa. Maintenant que je suis un bon photographe, notre idylle est vouée à l'échec. Mon amour a existé, nos souvenirs restent ! Mais ma passion pour toi s'est transformée en souffrance.
Comment ? Je te trahis ? Tu es si fier, si orgueilleux, Capa ! Tu penses m'avoir appris la photographie ? Mais en réalité c'est tout le contraire ! Je t'ai créé, Capa ! Rappelle-toi ! Qui étais-tu avant moi ? André, le petit photographe méconnu... Je t’ai créé une identité, toi, devenu l’illustre photographe américain ! C’est moi, ton succès, Robert Capa ! Moi ! Et tu ne cesses d’en profiter, à chaque instant. Toutes ces photographies, que j’ai prises , et qui sont signées de ton nom ! Ce n’est plus possible. C’est fini. Je ne veux pas, je ne pourrai pas pour toujours vivre cachée derrière toi ! Oui, Robert, je veux être reconnue comme une grande photographe. Et cela, je ne peux le faire que si tu n'es pas présent.
Tu me dis que nous sommes faits l'un pour l'autre. Mais c'est faux ! Nous sommes si différents, toi et moi ! Moi, je veux vivre seule ; toi, tu veux vivre à deux ! Tu ne cesses de vouloir me protéger, Robert, de tous les dangers, de tous les hommes... Comment ai-je fait avant de te rencontrer ? Tu te le demandes ? Je suis indépendante, Robert. Tu étais sûr de me tenir auprès de toi pour toujours, tu étais fier ! Cesse de vouloir me protéger, m’attacher à toi, petit machiste de l’est ! Je ne me soumettrai jamais à tes besoins, tes désirs ou tes craintes. Jamais !
Personne ne dicte et ne dictera ma vie. Je suis libre ! La guerre, aussi terrible puisse-t-elle être, aussi dramatique, aussi dure, me montre chaque jour le chance que j'ai de vivre. J'ai besoin de montrer à travers mes photos le vrai visage de la guerre, la souffrance, la peur, le courage, l'espérance. Seule. Tu m'entends ! Toi, qui lis cette lettre, jamais je ne serai à toi. Je n'appartiens à personne. J’appartiens à la guerre, j’appartiens à la photographie, je n’appartiens qu’à moi-même.
Tu croyais en nous, je crois en moi. Tu veux, mais je ne veux pas ! Pars et ne reviens plus ! Ne m'attends pas Capa, je pars moi aussi ... mais seule ! Adieu.
Gerda.